Repris d’ailleurs:

Ca fait 6 ans que je suis dans la même boîte (une grosse multinationale bien classique), boîte que j’ai rejointe après mes études sup. J’ai commencé en tant qu’ “expert technique” (rien de pompeux, c’est juste que les ingés du rang sont divisés en expert technique et en manager dans la boîte).

J’adorais ce que je faisais, j’étais même plutôt bon donc j’ai eu une progression sur le plan professionnel et salariale plutôt intéressante. Une première promotion au bout de 3 ans, toujours en restant dans la technique. A ce stade là, j’étais à un salaire plutôt pas dégueu pour mon expérience (60k sur Paris) mais je sentais avoir atteint le plafond pour quelqu’un dans la technique.

Mon N+1 m’a toujours bien considéré, ce qui fait qu’au bout de quelques années j’ai pu bénéficier d’un plan de carrière personnalisé (qu’on me dit réservé aux “high performers”), où l’idée est de me préparer à prendre des fonctions managériales. S’en est suivi des prises de responsabilités qui sortent de mon expertise technique, des formations (majoritairement bidons), des contacts de plus en plus fréquents avec le “leadership management” et de 2 détachements de plusieurs mois à l’international tous frais payés (superbe expérience au passage!).

Suite à quoi, il y’a un peu moins d’un an, on me propose une promotion pour transitionner de la technique vers le management. J’avoue que sur le moment, j’étais pas super chaud, je ne me sentais pas fait pour manager des gens et je me destinais plutôt à la technique. Seulement voilà, on me propose une augmentation de 50% de mon salaire pour me porter à 90k, difficile de refuser. Je me dis que ça doit pas être si compliqué que ça et qu’en plus je pourrais continuer à faire un peu de technique.

Un an plus tard, je regrette mon choix. Si en terme de volume horaire ça a pas beaucoup changé (39h classique, pas d’astreinte ou autre), la charge mentale a explosé. Les réunions qui se suivent pour donner son avis sur des choses futiles, les conflits politiques entre différentes équipes, les histoires de budgets, la partie administratives, les demandes farfelues qui me viennent à droite, à gauche, d’en haut, expliquer au top performer de mon équipe qu’il ne pourra pas être payé plus que 50% que le bottom performer alors qu’il produit 10 fois plus en quantité et en qualité, celui qui est en arrêt maladie un tiers de l’année, celui qui est tellement peu efficace qu’il retarde les projets plutôt que de les avancer, les RH qui me mettent des batons dans les roues pour recruter des bons éléments (salaire capés) et en même temps qui me compliquent la vie pour licencier des gens.

Bref, mes respects pour les managers qui arrivent à tenir. Je pense que je vais retourner dans la technique même si ça veut dire gagner moins …

  • Ysysel@jlai.lu
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    3 months ago

    J’ai eu une expérience similaire de “carriériste” (dans le sens ou je prenais tous les boulots qu’on me proposait si c’était mieux payé) où j’ai carrément terminé CTO d’une entreprise. Ce n’est pas tant que la charge mentale était trop forte, mais que c’est inintéressant et peu stimulant intellectuellement. Je suis en désaccord avece témoignage sur ce point. Ça m’a conforté dans mes opinions : dans de nombreux cas, je ne comprends pas pourquoi les cadres sont mieux payés que les techniciens. Le niveau de compétence exigé est beaucoup plus faible, et la majorité du temps on fait des choses que n’importe qui peut apprendre en cinq minutes. Ça se voit dans le témoignage. Tous les exemples donnés sont des truc chiants, en effet, mais ça reste des choses que tout le monde peut gérer. Si vraiment c’est la raison pour justifier un gros salaire, alors ça justifie un 80k annuel pour les gens qui bossent au MacDo.

    L’humain ça peut être compliqué, mais si tu as un bon service RH ce n’est même plus ton problème. Ça restait le plus dur pour moi, car pas de service RH compétent dans l’entreprise. Ce service existait juste pour faire les fiches de paie et valider les congés/arrêts. J’ai dû licencier un connard qui harcelait les collègues. Mais même un connard ce n’est pas agréable à licencier, et le processus est long et désagréable pour tout le monde.

    Je doute qu’il y ait une porte de sortie en interne, il faut changer d’entreprise. Ça serait possible dans une petite boîte où tout le monde se comprend. Mais dans une grosse boîte, où il faut respecter la hiérarchie comme un bon toutou, dur de revenir à un poste de technicien. Ça va poser des problèmes de politique interne.

    • Camus [il/lui]OP
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      3 months ago

      Très intéressant, merci !

      Assez d’accord sur la non corrélation entre la complexité des tâches et le salaire